Ce n’est pas Darbellay qui tourne, c’est le vent

Christophe Darbellay défend la préférence nationale. Un revirement surprenant.
Grégoire Barbey

Le président du PDC Christophe Darbellay est un habitué des changements de position intempestifs. On le remarque d’autant plus en période électorale. Ainsi, le Valaisan a récemment déclaré dans un entretien accordé à la Tribune de Genève/24Heures (à lire ici) que la préférence nationale «devrait être maintenant une évidence». A propos de l’immigration, il dit que la situation est calamiteuse. Il précise cependant qu’il ne faut pas toucher aux accords bilatéraux. Double discours pernicieux. Et la préférence nationale, n’est-ce pas justement une mesure contraire au principe d’un grand marché unique de l’emploi? Evidemment, le président du PDC se garde bien de réfléchir à cette éventualité. Il préfère charger le conseiller fédéral en charge de l’Economie Johann Schneider-Ammann, cible toute désignée par les temps qui courent.

Christophe Darbellay reproche à la Confédération de «n’être pas fichu de former le tiers de nos médecins». Et la préférence nationale devrait résoudre le problème? On ne comprend pas vraiment les propos du président du PDC. En fait, il se contente de tenir un discours plus ferme, alignant quelques énormités sans lien direct pour flatter l’électorat de l’UDC. Mais depuis cet entretien surréaliste, Christophe Darbellay a déchanté. Dimanche, son parti a pris un sacré revers avec le refus par la population de son initiative à plus de 75% des suffrages. L’UDC s’était pourtant ralliée à la cause du PDC, mais elle n’a servi à rien, a finalement reconnu le Valaisan. Un peu tard pour réaliser qu’un front UDC-PDC ne va sans doute pas de soi. Certes, Christophe Darbellay aimerait bien récupérer un deuxième siège au Conseil fédéral pour son parti. Les courbettes à l’UDC sont donc nécessaires.

Mais pas sûr que cette manière de se tortiller en reprenant à bon compte le programme de ceux qu’on a tant houspillé soit une stratégie très rentable. Le conseiller d’Etat et conseiller national UDC Oskar Freysinger ne s’y est pas trompé: il interroge sur sa page Facebook Christophe Darbellay afin de savoir s’il comptait prendre sa carte de membre UDC Un trait d’ironie qui en dit long sur le sentiment suscité par cet étonnant tour d’équilibriste politique. Le président du PDC n’a probablement rien gagné en tenant de tels propos. A prendre les électeurs pour des dupes, on en paie souvent le prix. Christophe Darbellay est capable de tenir un discours construit (surtout quand il s’agit d’expliquer les raisons qui ont fait échouer l’initiative sur les familles). Ici, on peut invoquer la crise du franc, parler de l’incertitude conjoncturelle, tout cela permet de démontrer que les citoyens avaient peur d’accepter une initiative qui pouvait nuire à leur porte-monnaie. Mais sur l’immigration, le Valaisan joue la simplicité, et plutôt que de proposer des mesures acceptables pour lutter contre une hausse du chômage, il invoque la préférence nationale, thème particulièrement porteur en ces temps troublés. Ce ralliement de circonstance est de très mauvais goût. Ce n’est toutefois pas Darbellay qui tourne, c’est le vent. Surtout en campagne électorale.

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