Les Etats membres de l’Union européenne sont parvenus à un accord sur la question migratoire vendredi 29 juin aux alentours de 4h30. Un deal censé améliorer la situation aux frontières du Vieux Continent, particulièrement en ce qui concerne les pays de premier accueil (dont la Grèce et l’Italie), lesquels subissent de plein fouet les conséquences de l’application de l’accord Dublin. Cet accord prévoit en effet que les requérants d’asile doivent faire leur demande dans le premier pays par lequel ils sont entrés en Europe. De facto, ce sont les pays limitrophes de la Méditerranée qui sont donc les principaux concernés, de telle sorte que la situation en devient ingérable.
Ce n’est pas par hasard si l’Italie, plongée dans une crise politique depuis cinq ans, a récemment donné le pouvoir à un gouvernement issu des rangs populistes. La pression qui s’exerce sur ce pays est immense et les conséquences sur l’opinion publique sont évidemment négatives.
Ainsi donc, les Etats membres ont décidé, une fois de plus, de nouer un accord sans avenir et surtout dénué de toute solidarité ou forme de courage politique. Ce deal en cinq points prévoit notamment de limiter l’arrivée d’êtres humains sur les rives de l’Union européenne en créant des centres dans les pays d’émigration. Mais il prend également une disposition s’agissant des Etats membres: ceux-ci pourront créer des centres d’hébergement pour les migrants… sur une base volontaire.
Le président français Emmanuel Macron a eu ces mots pour qualifier l’accord conclu vendredi: «C’est la coopération européenne qui l’a emporté». Cet élan de positivisme ne cache pourtant pas une réalité beaucoup plus sombre: une fois encore, les Etats membres n’ont pas réussi à s’accorder sur une solution où la solidarité avec les pays de premier accueil permette d’établir une juste répartition des réfugiés et autres arrivants entre tous les pays européens.
De même, l’abolition de l’invraisemblable accord Dublin ne semble pas à l’ordre du jour. Celui-ci a pourtant démontré son non-sens en situation de crise migratoire, obligeant les pays de premier accueil à subir de plein fouet les conséquences des crises qui forcent des millions d’êtres humains à fuir l’exploitation et la misère et à se rendre en Europe pour tenter de trouver de meilleures conditions de vie.
C’est en définitive la politique de l’autruche qui l’a une nouvelle fois emporté. Les Etats membres pourront continuer à ne pas accueillir davantage de réfugiés et de migrants sur leur sol, puisque l’essentiel de l’accord est basé sur le volontariat. Les chefs d’Etat européens préfèrent éviter de se confronter à leur opinion publique en s’imposant une solidarité pourtant logique entre pays membres d’une même organisation. Pire, ils créent un écran de fumée en mettant en avant leur désir de contenir les flux migratoires. Mais même avec toute la bonne volonté du monde, créer des centres dans les zones d’émigration de réglera pas le problème. Il le déplacera. L’effacera peut-être des urgences de l’agenda européen. Sans pour autant améliorer la situation de ces millions d’êtres humains qui, sans doute, préféreraient ne pas devoir quitter leur pays d’origine si les conditions le leur permettaient.
Enfin, l’absence d’un véritable deal solidaire entre les Etats membres permet à la Turquie d’Erdogan de continuer à jouer sa participation et à retenir une partie des migrants sur son territoire pour décharger l’Union européenne. De cette façon, l’hyperprésident turc s’assure que l’Union européenne ne mettra pas trop son nez dans ses affaires.
La crise migratoire qui agite tant les esprits n’a pas encore trouvé son épilogue avec cet accord mou, lâche et malheureux. ◄