L’arrivée de la société américaine Uber en France a suscité une vague de violence inouïe. Des chauffeurs de taxi ont été jusqu’à malmener physiquement des clients et des collaborateurs de l’entreprise. De nombreuses vidéos dénonçant ces comportements ont été publiées ces derniers jours sur internet. Ce lundi 29 juin, les taxis genevois ont pour leur part bloqué le centre-ville et exigé la démission du conseiller d’Etat Pierre Maudet. Le débat – qui était déjà fortement clivant avant ces tristes événements – a dévié sur un conflit pour ou contre Uber (et donc pour ou contre les taxis) de façon généralisée. Comme si les évolutions technologiques et les opportunités d’affaires devaient faire l’objet d’un réflexe d’adhésion immédiat. L’entreprise Uber semble avoir l’opinion publique derrière elle. Le quasi-monopole de la profession des taxis sur le transport professionnel de personnes n’est certes plus défendable. Mais ce n’est pas pour autant que les gouvernements ne doivent plus appliquer les lois.
La méthode d’Uber est d’ailleurs particulièrement cavalière: la société lance l’une de ses applications (certaines étant plus controversées que d’autres) dans une ville sans discussion préalable avec les autorités locales. Ce qui les pousse bien sûr à se positionner. La dernière en date en Suisse est Lausanne. La Municipalité a décidé que tout particulier proposant un service de transport de personnes contre rémunération doit répondre aux conditions d’accès à la profession de chauffeurs de taxis posées dans le règlement communal. Il ne pouvait en être autrement. En l’absence d’une décision judiciaire qui qualifierait l’activité d’Uber différemment de celle des taxis traditionnels, les autorités doivent faire respecter la loi et les règles qui en découlent.
L’innovation technologique est aujourd’hui bien plus rapide que ne l’est l’évolution législative. C’est un fait. Mais ce n’est pas pour autant que les décisions politiques doivent être prises dans la précipitation. Au contraire. Le cas Uber est plutôt une leçon en matière de réglementation professionnelle. A l’avenir, cette expérience permettra sans doute au législateur de créer des lois suffisamment générales pour ne pas bloquer toute forme de concurrence. Si les taxis n’avaient pas fait l’objet d’une surprotection législative moyennant une taxe arrangeant l’Etat, un tel conflit n’aurait jamais vu le jour dans de telles proportions. Dont acte.